15 septembre 2014

Froissement de vide.

Faux espoir, tu peux crier que la vie est une putain, tu peux penser que rien fera plus jamais briller le soleil, que la lune est à jamais engloutie dans la pire des noirceurs, celle qui oublie jusqu'aux reflets de sa propre lumière, tu peux, parce qu'il y aura toujours quelqu'un pour protester, pour te dire que tout continue quand même, qu'on s'arrête pas à ça, qu'il faut lever le nez et regarder droit devant. À toi de voir quand tu seras prête à voir le soleil en face, à pleurer avec comme dernier prétexte que t'es éblouie.

La terre tourne, la lune a arrêté sa course, un demi cycle, un petit retour en arrière, voir que rien n'est bien à Bruxelles en Belgique en Europe dans le monde, tu crois qu'elle avait compris ? Qu'elle avait choisi, dès le départ ? On peut demander aux constellations, qu'elles lui murmurent la question, qu'elles nous renvoient la réponse en morse ou en braille, on se débrouillera bien pour décoder, hein ?...

Oh, vraiment, c'est la fin d'un monde, celui tout rose bonbon qui attendait qu'un poupon pour babiller. Son berceau est préparé de l'autre côté de la vie, une peluche et un biberon encore chaud au fond des draps.

J'ai regardé par la fenêtre, hier soir, avec cette pauvre étoile perdue toute seule dans l'univers, presque embarrassée d'être là, de dissuader la foule de se masser autour de la lune blanc linceul, genre circulez y'a rien à voir, étrange ange gardien aux ailes à peine écloses. Ça avait quelque chose de morbide, un peu terne, résolument intimiste. Ça faisait un peu voyeur, comme si je contemplais le coucher tardif d'une déesse en tenue de nuit. Ça rimait à rien.

La lune était réduite à un trait blanc dans l'immensité noire, quelque chose d'abstrait, un pied de nez à l'idée que tout doit toujours bien aller dans ce monde pourri, un souffle glacé sur une vitre en verre, tu sais, tellement évanescent et vaporeux qu'on se demande bien comment on peut le suivre des yeux. Aimé, attendu, un fil, une brise, une aile de papillon bercée par la mer, et une grande chapeautée gênée de s'immiscer dans le rêve. Ç'aurait été beau, si ç'avait pas été si dur.

Aujourd'hui le soleil brille cet impudent, il se rend pas compte, c'est la tempête partout dans ta tête et dans ton cœur comment il peut oser faire sourire le reste du monde ? Tu te sens même pas en droit de crier que t'as mal, t'as l'impression d'être noire et blanche collée sur une affiche pleine de couleurs, c'est toi qui es décalée et les autres qui te montrent du doigt avec ta propre croix sur la poitrine…

Tu voudrais leur dire que t'es veuve d'amour, morte dans les bras d'un cercueil trop petit pour contenir ta peine, écorchée vive dans la peau de ton frère tombé au fond du gouffre. Ça va prendre du temps de te réconcilier avec la vie, d'arrêter de trembler à chaque coup de téléphone, à chaque coup de frein un peu brusque ou à chaque cri dans la rue. C'est bête. Le temps, on passe sa vie à le tuer, et c'est quand il commence à manquer qu'on lui court après en s'insurgeant parce qu'il nous a pas attendus, ce salaud.

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